
L'ultra-luxe a fière allure
Les rapports de fin d'année de Moncler et Hermès le confirment
14 Février 2025
Cela fait plus d’un an que l’on parle de la longue et tumultueuse crise du luxe. LVMH avait déjà signalé une situation stagnante même au cours du quatrième trimestre 2024, prouvant que même l’esprit des fêtes n’avait pas réussi à relancer les ventes. Kering, en revanche, semble être le groupe le plus touché, avec une valeur boursière quasiment réduite de moitié en 2024 (sans parler de la situation Gucci). En somme, la roue du luxe ne semble pas donner de signaux positifs, même pour 2025. En revanche, si l’on parle d’ultra-luxe, la situation change radicalement. Ces derniers jours, les résultats financiers de 2024 de Moncler Group et Hermès International ont montré que non seulement la crise ne les affecte pas, mais que leurs performances sont plus que positives, même en Chine. Moncler a clôturé 2024 avec un chiffre d’affaires dépassant les 3,1 milliards d’euros, enregistrant une augmentation de 4 % par rapport à l’année précédente. Hermès, quant à lui, a signé un quatrième trimestre record, avec un chiffre d’affaires ayant franchi la barre des 4 milliards d’euros. La réalité est simple : si un produit est perçu comme un investissement durable et que la marque bénéficie d’une ultra-fidélisation, la crise n’est qu’un petit contretemps.
@isobellorna_ We manifested this Birkin together Had to get Ania something too… #hermes #birkin #shopping #london A Summer Place - Hollywood Strings Orchestra
Moncler, par exemple, a enregistré, en plus des ventes, une progression de 7 % à taux de change constants. À un moment où plusieurs marques peinent à retrouver un élan, Moncler a connu en Chine une croissance à deux chiffres, grâce à des initiatives ciblées telles que des collections capsules et des événements d’envergure. Le plus marquant fut Moncler Genius à Shanghai, qui a généré plus de 67 millions de vues, confirmant l’attrait de la marque sur un marché clé en pleine mutation. De manière plus large, le marché asiatique – incluant le Japon et la Corée du Sud – a affiché une croissance de 7 %, accélérant jusqu’à 11 % au dernier trimestre, preuve d’un intérêt croissant pour la marque. Hermès, pour sa part, a clôturé 2024 avec des ventes atteignant 15,2 milliards d’euros, soit une augmentation de 15 %. L’exploit majeur est survenu au dernier trimestre, avec un bond de 18 % surpassant largement les prévisions initiales des analystes. Des icônes comme les sacs Birkin et Kelly continuent d’être des objets de désir, maintenant une demande forte même en période d’incertitude économique. Hermès a aussi profité d’une stratégie d’expansion au Moyen-Orient, en prenant le contrôle direct de plusieurs boutiques aux Émirats arabes unis et en réalisant une progression impressionnante de +123 % dans la région. Par ailleurs, les États-Unis ont contribué avec une hausse de 22 % des ventes, soutenue par l’ouverture de nouvelles boutiques et une clientèle toujours très attirée par les nouveautés de la marque. L’Europe, bien que n’affichant pas des chiffres aussi spectaculaires que le Moyen-Orient, a tout de même enregistré une augmentation de 20 %, portée par le retour du tourisme international et un regain d’intérêt pour les produits haut de gamme.
Ces données révèlent un écart croissant entre le luxe traditionnel et l’ultra-luxe : tandis que LVMH et Kering doivent faire face à des ventes en demi-teinte, Moncler et Hermès affichent une vitalité significative. Une partie de cette différence réside dans leur capacité à construire un imaginaire puissant, soutenu par des événements et des collaborations avec des designers ou artistes influents. Moncler, plus que tout autre marque cette année, a su trouver un équilibre parfait entre héritage et innovation, passant du méga-événement lors de la Shanghai Fashion Week à son prochain défilé à Courchevel, profitant d’un engouement renouvelé pour le ski et toute la culture autour des destinations de luxe en montagne. Parallèlement, Hermès se confirme comme l’une des marques les plus convoitées au monde, grâce à un savant mélange de tradition artisanale, de production limitée et d’une aura d’exclusivité qui séduit les acheteurs, indépendamment des fluctuations de l’économie mondiale. D’ailleurs, au cours de l’année écoulée, plusieurs signes ont démontré un fort maintien de la réputation en Chine pour Hermès et Chanel, indiquant que parmi toutes les marques de luxe (notamment dans la maroquinerie), il n’y aurait ni effondrement ni variations majeures comme chez certains concurrents.
@itiscarine shopping for my dream watch at @Cartier #luxuryshopping #shoppingvlog #cartierwatch #luxurywishlist #cartierbaignoire #cartier #capcut original sound - itiscarine
À la lumière de ces éléments, l’ultra-luxe semble non seulement résister, mais même prospérer en cette période d’incertitude. L’offre s’adresse à une cible extrêmement restreinte et réceptive aux produits et expériences uniques, où le prix élevé n’est pas un frein, mais plutôt un gage de prestige. Alors que le luxe traditionnel doit composer avec un public plus large, sujet aux fluctuations économiques et aux changements de priorités d’achat, l’ultra-luxe séduit une niche qui continue d’investir dans la qualité et le statut. Par conséquent, les marges restent élevées, permettant de réinvestir dans la recherche, les collaborations et de nouvelles implantations internationales. Un autre exemple frappant est la croissance des ventes de Richemont au quatrième trimestre, avec une progression de 10 % dans la haute joaillerie, un segment réservé à l’élite.
What I’d do for a black birkin 25 right now…or mini Kelly.
— Glamorizing Tech (@princessxap) January 1, 2025
Dans les mois à venir, la différence de performance entre le luxe et l'ultra-luxe pourrait s'accentuer, en particulier si le climat économique continue à remettre en question la consommation haut de gamme, mais pas ultra-haut de gamme. Cependant, la leçon que nous enseignent des marques comme Moncler et Hermès est qu'une identité de marque solide, combinée à une stratégie basée sur des propositions exclusives et hautement désirables, peut faire toute la différence. Cette perspective devient encore plus évidente lorsqu'on observe les résultats enthousiasmants obtenus sur des marchés complexes comme la Chine, où la concurrence est féroce et où les consommateurs sont de plus en plus réticents à investir dans des marques qui tentent d'attirer l'attention sans authenticité. Mais le succès reste garanti pour les Maisons qui parviennent à capter les humeurs du public et à les transformer en nouvelles opportunités commerciales, comme ce fut le cas pour Bulgari avec sa campagne « Year of the Snake », considérée comme l'une des seules capsules triomphantes du Nouvel An lunaire dans le monde du luxe. En même temps, le simple fait que le haut de gamme continue d'afficher des résultats positifs indique que, malgré les vicissitudes, les clients sont toujours prêts à acheter et à dépenser. Espérons que ces comportements d'achat se répandront comme une traînée de poudre jusqu'à la fin de l'année 2025.