Les créateurs derrière Matières Fécales, la marque qui a fasciné la Fashion Week de Paris

Matières fécales est l’une des marques émergentes incontournables qui a fait ses premiers pas à la Fashion Week de Paris la semaine dernière. Derrière ce nom qui marque les esprits - pour en dire le moins-, se cache un duo visionnaire qui n’a pas peur de redéfinir le beau et le grotesque, imposant leur esthétique avant-gardiste sur les podiums les plus prestigieux. Hannah Rose Dalton et Steven Raj Bhaskaran se sont rencontrés au Collège LaSalle à Montréal en 2016 alors qu’ils étudiaient tous les deux la mode. À première vue, tout semblait les opposer. Hannah, née en Nouvelle-Zélande est issue d’un milieu aisé et a été scolarisée dans une école privée, contrastait fortement avec Steven, queer et non-binaire, qui a grandi en Guyane et puis au Canada dans des circonstances précaires conjugués aux nombreuses discrimations auxquelles il a fait face. Dans une interview accordée à Hypebae, Steven confie qu’à leur première rencontre, il a pensé qu’ils ne s’entendraient pas, notamment en raison de leurs différences marquées, y compris sur le plan vestimentaire. Hannah avait également une mauvaise impression de son futur partenaire. «Nous n'avions pas la même ambiance : j'étais très studieuse, je prenais beaucoup de notes en classe, et Steven était plus créatif, ce qui m'énervait.» explique-t-elle au magazine Antidote.

Pourtant, au-delà de ces contrastes, ils ont découvert un profond terrain d’entente dans leur rejet du statu quo et leur volonté commune de redéfinir la féminité de façon radicale. La signature de cette marque canadienne se distingue par son esthétique singulière mêlant post-humanisme et style gothique, sublimée par l’utilisation de prothèses audacieuses.Les mannequins ont le crâne lisse, des sourcils rasés, et un maquillage dramatique donnant un effet “alien” qui est à la limite du dérangeant. Les créateurs eux-mêmes incarnent cette esthétique singulière qui défie les normes de la beauté traditionnelle. Hannah et Steven arborent un style hors du commun : crâne lisse, sourcils rasés, lentilles agrandissant le regard et un maquillage qui renforce leur apparence post-humaine. Chaque détail de leur allure semble être une extension de leur art, brouillant la frontière entre mode et performance. Cependant, cette audace stylistique ne les a pas laissés indemnes. Leur apparence radicale suscite des réactions violentes, allant de la simple moquerie aux agressions physiques. Ils ont notamment été attaqués dans un bus, une expérience traumatisante qui illustre l'intolérance persistante face à la différence. En ligne, le harcèlement est tout aussi présent : les créateurs reçoivent régulièrement des menaces de mort sur les réseaux sociaux, preuve que leur vision de la mode continue de provoquer et de diviser.

Malgré ces obstacles, le duo ne se laisse pas intimider et continue de défendre son esthétique unique. En parallèle de leur travail dans la mode, ils sont également DJs, explorant d'autres formes d'expression artistique. Hannah explique que lorsqu’ils sortaient en soirée, ils n’aimaient jamais la musique parce qu’ils étaient sobres. Alors, ils se sont dit qu’ils devraient créer leur propre musique, qui donne envie de danser même sans une goutte d’alcool dans le sang. Leurs performances musicales, tout comme leur création vestimentaire, défient les conventions et plongent leur audience dans un univers dystopique et immersif. Avec leur marque Matières Fécales, Hannah et Steven poursuivent leur mission de redéfinir la beauté et d'explorer l'identité au-delà des normes imposées par la société. Bien que leur parcours soit semé d'embûches, leur détermination à repousser les limites de l'art et de la mode fait d'eux des figures incontournables de la création contemporaine.