
Le charme à double tranchant des bagues JoliPNJ raconté par leur créatrice Entretien avec Chloé Foulquier, la créatrice qui remplace les diamants par du verre
Des doigts de la jolie Théodora à ceux de Yeozang du groupe Ateez en cover de Numéro Magazine, les bagues de JoliPNJ sont partout. Tantôt transparentes tantôt colorées, aux recoins parfois arrondis souvent pointus mais toujours en verre, les bijoux de la créatrice Chloé Foulquier représentent le parfait équilibre entre le doux et le féroce, le transparent et l’opaque, l’ombre et la lumière. Forte de son expérience chez Balmain et Miu Miu, Chloé réussit aujourd’hui à allier comme personne tous ces éléments contradictoires et pourtant complémentaires dans des bijoux uniques, poétiques, auto-suffisants, au coeur d’une marque à la forte personnalité qu’elle nous raconte aujourd’hui à travers ses propres mots.
Si elle brille aujourd’hui à travers les bijoux et manie à la perfection le verre borosilicaté, c’est le tissu et les patrons que Chloé maniait autrefois avec habilité, ayant fait ses débuts dans la création à travers des études de Design de vêtements. « Après mes études, même si j’adorais le vêtement, j’ai ressenti une sorte d’overdose. Trop de marques, trop de saisons, trop de “produits”. Je ne retrouvais plus ce qui me faisait rêver. Alors je me suis tournée vers l’accessoire, plus proche de l’objet, moins saisonnier, qui dure dans le temps. » nous explique-t-elle « Mais après Miu Miu et Balmain, quelque chose d’autre m’appelait. J’avais besoin de matière, de liberté, d'imaginer un univers qui me ressemble, fait de gestes et d’imaginaire. Quelque chose qui me permette à nouveau de rêver et de créer une connexion directe avec les gens. » « En maroquinerie, on dessine, on fait des fiches techniques, puis ce sont les modélistes et les usines qui donnent vie aux modèles. Le contact avec la matière reste finalement assez limité. Parfois, on réalise des maquettes pour chercher les volumes — c’était d’ailleurs une de mes parties préférées. Aujourd’hui, dans mon travail, c’est différent : la matière est au centre. Je crée directement dans la flamme de mon chalumeau, comme si je dessinais en trois dimensions.»
Et en parlant de matière, bien qu'elle adore manier le chalumeau, Chloé n’a pas choisi le chemin le plus facile, en optant pour le verre borosilicaté pour ses bijoux. « J’ai commencé avec le verre sodocalcique, une autre typologie de verre qui est plus sensible, plus liquide, plus enclin aux chocs thermiques. C’est quand j’ai commencé à travailler les bagues que je suis passée au borosilicate. C’est un verre plus résistant aux chocs thermiques, plus pérenne dans le temps, qui garde tout son éclat. Il est utilisé notamment en verrerie de laboratoire, en aéronautique, en optique. Il supporte mieux les chocs, même si bien sûr cela reste du verre, un matériau délicat dont il faut prendre soin. Il demande aussi une température de chauffe plus élevée » continue-t-elle.
Elle n’a toutefois pas été seule dans son parcours vers la compréhension et la maîtrise de cette matière complexe et particulière, mais a eu la chance d’être épaulée par l’artiste japonaise Michi Suzuki, vétérante du travail en perles de verre. « C’était une vraie rencontre. Sa précision, sa concentration, sa gentillesse. On ne parlait pas beaucoup, elle m’offrait un thé, on échangeait beaucoup par les gestes. Elle me montrait, puis me laissait faire. J’ai d’abord fait beaucoup de perles pour apprendre. Puis un jour, elle m’a montré comment faire des bagues. Et à partir de là, j’ai commencé à tester, à expérimenter. J’étais émerveillée d’avoir accès à ce savoir-faire » raconte Chloé.
Un savoir-faire qui se partage et devient tangible aujourd’hui dans des bijoux qui semblent légers comme l’air, dangereusement fragiles, mais pourtant bien tenaces, solidifiés par une cuisson descendante, par paliers, qui élimine toutes les tensions du verre. « C’est un contraste que je trouve très beau, la délicatesse du verre et la main qui vit. Le Borosilicate est résistant, mais il demande malgré tout de l’attention, du soin. C’est comme prendre soin de soi. La fragilité, c’est le vivant : puissant, magnifique mais aussi vulnérable. C’est le miroir de notre monde. » Le miroir de notre monde, mais aussi du processus de fabrication de la designer, qui se fait tout en douceur et en poésie : « Lorsque je crée une pièce, je ne dessine pas. Je pars d’une baguette de verre que je fais fondre doucement, puis je laisse le dialogue s’installer entre la matière, la flamme et moi. L’accident advient lorsque la matière nous amène à un endroit où nous ne serions pas allés en imaginant une pièce. C’est ce qui la rend profondément vivante. Cela permet de dépasser une simple idée ou projection mentale, pour aller vers le renouveau, l’inattendu, l’émerveillement. »
Un lyrisme que l'on retrouve dans chaque détail de JoliPNJ, même dans son nom, tiré du monde des jeux vidéos : « Ce qui m’intéresse dans le gaming, ce n’est pas vraiment le jeu en lui-même. Ce qui me parle, c’est l’idée de pouvoir évoluer dans un monde imaginaire, d’expérimenter une vie parallèle, d’explorer un ailleurs. C’est aussi ce qui me plaît dans la science-fiction : ce sont des portes ouvertes, qui permettent à l’imagination de vivre des choses qu’on ne pourrait pas expérimenter autrement. »




































