
Ces marques qui ont (littéralement) retourné leur veste lors de cette PFW
Marie Adam-Leenaerdt et Zomer jouent des apparences
12 Mars 2025
Au matin du 4 mars, les marques Zomer et Marie Adam-Leenaerdt présentaient successivement leur quatrième et cinquième collections respectives. Finaliste du prix LVMH en 2024, Marie Adam-Leenaerdt précède de peu Zomer, demi-finaliste cette année. Si les deux marques à l’esthétique bien distincte, semblent sur la même cadence, ce sont leurs approches qui semblent tout particulièrement se répondre cette saison.
Un défilé qui commence par le grand final. Un salut de dos. Une collection littéralement pensée à l’envers. Le duo derrière Zomer frappe encore. Fondée par le designer Danial Aitouganov et le styliste Imruh Asha en 2023, la marque dévoilait sa Collection 04 dans les sous-sols épurés du Palais de Tokyo. Pour l’occasion, le plafond de la salle du Saut du Loup s’ornait d’une farandole d'abat-jour vintage, premier indice d’une collection pensée à rebours. Cette saison, le duo mise sur des silhouettes sens dessus dessous. Les cols de chemise habillent le bas des manteaux et décorent les pantalons de leur liseré blanc. Les trench-coats se boutonnent dans le dos, dégageant la nuque. Quant à la fente de la jupe, originellement à l’arrière, elle migre vers l’avant et offre immédiatement au regard, une jambe en mouvement. Côté accessoires, Zomer collabore avec la marque de baskets finlandaise Karhu dont le lancement a été dévoilé quelques jours avant le défilé dans une campagne très graphique sobrement appelée « mind, body and sole ». Comme un pied de nez à la course infernale au it-bag menée par les grandes maisons, le label propose le « no budget bag », un sac réduit à de simples anses qui laisse libre court à l’imagination de la personne qui le(s) porte. Mais l’expérimentation n’exclut pas pour autant la fonctionnalité. Derrière l’exubérance, Zomer peaufine chaque pièce pour qu’elle soit parfaitement portable.
Chez Marie Adam-Leenaerdt, l’invitation au défilé comportait déjà des indices : deux pièces de deux euros numérisées sur du papier, identiques dans leur valeur, mais subtilement différentes dans leur apparence. Un avant-goût d’une collection en deux temps. La première série de 24 silhouettes se distingue par une sobriété impeccable, où le feutre laissé brut et les coupes marquées — notamment à la taille et aux épaules — témoignent d’un savoir-faire maîtrisé. Elle montre également tout le cheminement nécessaire pour ériger une silhouette. Un processus que Marie Adam-Leenaerdt elle-même définit comme une « charpente », une base architecturale sur laquelle elle compose ensuite un second récit, plus riche en détails. Émergent alors des pointes de couleurs, une touche de léopard ou des noeuds disséminés ici et là. Par endroits, le vêtement semble simplement retourné, ailleurs, il devient méconnaissable. Comme chez Zomer, la créatrice explore l’envers, en faisant de la housse de protection des vêtements, une pièce à part entière. Elle va même jusqu’à renverser les proportions d’une jupe qui donne l’impression qu’elle a été retournée à même le corps.
Alors que Zomer joue sur la déconstruction et les effets d’optique, Marie Adam-Leenaerdt pousse la rigueur architecturale toujours plus loin, en nous plongeant dans les coulisses de la fabrication du vêtement. L’un comme l’autre partagent le même désir de retourner le vêtement, d’interroger son usage, sa perception et son rapport au corps. S’ils ont choisi de bousculer les codes en retournant vestes, jupes et proportions, la mode, elle, ne leur tourne pas le dos. Bien au contraire : elle leur ouvre grands les bras.