La campagne publicitaire folle et risquée de « Bugonia » Vous raseriez-vous la tête pour un film ?

«Bienvenue au quartier général de la résistance humaine» est ce que vous trouverez inscrit en entrant sur le site Human Resistance HQ. La page, à l’interface grossière et aux polices discutables, est née en parallèle de la promotion du prochain film à venir de Yorgos Lanthimos, Bugonia, présenté en avant-première à la Mostra de Venise et à l’affiche depuis le 23 octobre. Il s’agit d’un remake du film coréen Save the Green Planet! (titre original «Jigureul jikyeora!»), sorti en 2003 et réalisé par Jang Joon-hwan, à l’occasion de ses débuts au long métrage.

Semblable à de nombreux portails que l'on peut trouver en ligne, repaires de complots et de civils qui se réunissent pour discuter et chercher des solutions contre des menaces apparemment imminentes telles que l'invasion possible de la planète par des espèces extraterrestres, le site n'est rien d'autre qu'une extension, un easter egg extra-cinématographique de l'œuvre avec Emma Stone et Jesse Plemons. Il n'est pas difficile d'imaginer que dans le film, Teddy, incarné par Plemons, pourrait utiliser ce site pour tenter de sauver la Terre - selon lui en danger - et finir par kidnapper la PDG (Stone) d'une importante entreprise pharmaceutique, pensant qu'il s'agit en réalité d'une Andromédienne.

@db_gordon Would you shave your head to see a movie early? BUGONIA held a bald screening in LA where people had to shave their head to see the movie early. #bugonia #fypage #bald #la So Fresh, So Clean - Outkast

Le soin apporté à la campagne publicitaire de Bugonia ne se limite pas à l’image de la page web, mais inclut les contenus proposés aux utilisateurs, certains commentés par les inscrits. Il s’agit de schémas, dessins, voire de articles, tout ce matériel étant fictif et créé exprès pour la campagne promotionnelle. La touche raffinée réside dans certains extraits du magazine Forbes rapportant des interviews de Michelle Fuller, la CEO interprétée par Stone. Certaines parties des articles sont même surlignées, considérées comme suspectes et pouvant servir à révéler la véritable nature extra-terrestre de la femme.

Pour la campagne publicitaire de Bugonia, l’équipe marketing n’a pas seulement œuvré en ligne : à Los Angeles, des panneaux ont également été installés affichant la pub de la société Auxolith, dirigée par Michelle, avec sa photo, vandalisée par l’inscription «racaille andromédienne». Le jargon typique des fréquentateurs de www.humanresistancehq.com. Toujours dans la ville californienne, lors d’une preview du film, seules les personnes chauves ont été admises au théâtre. Dans le cas où un spectateur n’était pas chauve, Focus Features avait prévu un coin barbier pour raser la tête de quiconque voulait absolument assister à l’avant-première de la nouvelle œuvre de Lanthimos. Une preuve de dévotion qui, par moments, a fait ressembler la fanbase du réalisateur grec à un véritable culte.

Comme toujours avec ses œuvres, Yorgos Lanthimos a su créer un monde dont l’esthétique est à chaque fois capable de dépasser l’écran, en soignant chaque détail du lancement, comme cela a été le cas avec l’image de Bugonia. Ce qui a beaucoup fait parler, c’est également le choix de la police pour le poster du film, réalisée par nul autre que Vasilis Marmatakis, graphiste avec lequel le réalisateur grec poursuit sa collaboration commencée en 2009 avec l’étrange Dogtooth et continuée sur tous ses films suivants. Une manière de faire du cinéma qui se propage également en dehors de la salle, augmentant et étendant des univers qui autrement n’existeraient que sur grand écran.

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